23/04/2011

l'art ancien du Mali - grande expo au Musée du Quai Branly

...à la même époque que les débuts de la statuaire romane en Europe, la grande richesse artistique de ce vaste plateau du centre-est du Mali, bordé par les longues falaises de Bandiagara, inscrites au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 2003. Une splendeur qui remonte à une époque largement antérieure à l’arrivée des premières populations dogons ...
Écaillées par les siècles, comme transformées en écorces, les épaisses patines dues aux onctions successives créent une émouvante impression de fragilité qui résiste au temps. Là encore, une porteuse de coupe, une pileuse de mil ou une sobre figure assise d’à peine 15 centimètres de haut, les mains devant les yeux, épurée, étonnamment moderne.
On comprend, en admirant toutes ces richesses, pourquoi les falaises de Bandiagara n’ont cessé, depuis leur « découverte » au début du XXe siècle (par le militaire Louis Desplagnes qui, le premier, rapporta en France des fragments de peinture rupestre), de fasciner le regard occidental. On le conçoit encore plus en s’intéressant à ce que l’on a eu coutume, ces dernières décennies, de nommer le « mystère dogon » et que la mission française d’ethnographie Dakar-Djibouti, montée par Marcel Griaule dans les années 1930, a tenté de percer.
Le scientifique et son équipe, au sein de laquelle figurait Michel Leiris, ont collecté une multitude d’œuvres et de récits, rassemblant des informations sur la relation des Dogons au monde, leur système, leur représentation d’un dieu unique, Amma, qui créa la Terre et en eut des jumeaux. L’un, Yurugu, se rebella et se changea en renard pâle. L’autre, Nommo, fut sacrifié pour rétablir l’ordre. Ses membres placés aux quatre points cardinaux donnèrent naissance à huit ancêtres de l’humanité, quatre mâles et leurs jumelles respectives, placés dans une arche descendant du ciel vers la terre.
Cette mythologie en rappelle d’autres, égyptienne notamment. Par ses analogies, elle permet bien plus d’établir la rencontre entre les Dogons et d’autres civilisations passées que de « révéler » une sorte de cosmogonie originelle. Mais peu importe. Le récit et ses représentations artistiques, que l’on découvre dans l’exposition, sont de toute beauté.
Pourtant, ces explications éclairantes interviennent tard dans la visite du Quai-Branly, alors qu’elles auraient eu leur place dès le début. Aussi, on se permettra, pourquoi pas, de suggérer une visite en commençant par la fin : le chef-d’œuvre d’abord, puis les objets de la vie quotidienne rassemblés par les ethnographes occidentaux, enfin la cosmogonie et la riche statuaire.
JEAN-YVES DANA
Jusqu’au 24 juillet. 37, quai Branly, Paris 7e.   01.56.61.70.00

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